Ode pour la venue du printemps

Ode pour hâter la venue du printemps

de Jean Ristat

Texte

  • Jean Ristat

Réalisation

  • Jean-Michel Rabeux

Avec

  • Claude Degliame
  • Jérôme Abenheimer
  • Francis Arnaud
  • Jean-Michel Rabeux
 
Le texte a été édité dans la collection « Poésie » de Gallimard.

Le titre du poème de Jean Ristat a un sens précis qui n’est plus perceptible aujourd’hui, qui l’était d’ailleurs peu à l’époque : Faisons la Révolution camarade, balançons le vieux monde aux orties. Chantons, puisque c’est une ode en alexandrins, la venue du communisme, c’est à dire  pour l’auteur et pour nous d’une liberté des arts et des mœurs la plus large possible. Le long poème était publié chez Gallimard, accompagné d’une photo d’un Mick Jagger magnifiquement androgyne. La liberté homosexuelle y était clairement chantée, exigée, le tout sous l’égide d’Aragon et en interpellation au Parti Communiste français : Bouge-toi un peu camarade !

Ô camarade
On a comme une impatience de printemps

Le texte dépasse bien évidemment la rage politique, il est d’une fracassante poésie, d’un érotisme masqué par le baroque, d’une profondeur de langage et d’amour rare.

C’est la revue poétique Digraphe qui produisit la mise en théâtre. Pour nous aider Claude Régy montait une adaptation du Mort de Georges Bataille, avec Axel Bogousslavsky, ce qui permit d’y adjoindre le texte de Ristat. Oui, ça se passait comme ça.

Je me souviens d’Aragon dans le bureau de Digraphe écrivant une lettre à Pierre Bergé, alors directeur des Théâtres de l’Athénée et Édouard VII. Je me souviens de sa main avançant régulièrement sur le papier, sans un arrêt, sans repentir, et de la lettre « parfaite » qui en était advenue et qui nous avait obtenu en effet l’accord et les sous de Bergé. Je me souviens d’une dispute entre Régy et moi parce que je trouvais qu’il prenait trop d’argent sur la production. On est vraiment facho quand on est jeune, mais j’étais persuadé que grâce à nous, le poème de Ristat et ce que nous en faisions sur le plateau, un monde nouveau était en train d’advenir. Cette altercation, dont j’ai encore honte aujourd’hui, avec un homme dont j’adorais le travail, m’a beaucoup aidé à comprendre que vouloir le Bien peut autoriser des comportements tout à fait maléfiques.

Je ne sais plus ce qui se passait sur scène, sauf que s’y jouait à la fin une interprétation choisie volontairement ringarde de L’Internationale, ce qui avait fait bien rire Aragon, et qu’on avait eu un papier dans L’Huma.

Jean-Michel Rabeux, Janvier 2024

Que me veux-tu qui es-tu comment savoir ce
Que tu caches avec tant de soin derrière
La dentelle d’un sourire je ne suis plus
Maître en mon logis Ô je me voyais unique
Je me retrouve plusieurs j’offre mon coeur
Pour nourrir la charogne peut-être charogne
Moi-même on the road again Ô j’ai du mal
À naître à la joie simple de ce qui se donne
Sans détour ceci n’est pas oracle j’enterre
Des siècles de résignation et de servitude j’a
Ppelle la douceur de la pluie sur mon corps
Meurtri et l’orgueil des glaïeuls empourprés je
Danse l’éclair au poing en chevauchant la foudre

4 représentations au Théâtre Edouard VII – Paris en mai 1979 dans le cadre de « La voix dans l’écriture » et à l’invitation de Claude Régy