Le vide était presque parfait

Le Vide était presque parfait

Spectacle sans texte de Marc Mérigot et Jean-Michel Rabeux

Conception

  • Marc Mérigot
  • Jean-Michel Rabeux

Avec

  • Delphine Boisse
  • Céline Caussimon
  • Georges Edmont
  • Patrick Lerch
  • Gaël Lescot
  • Laurence Martin
  • Marc Mérigot
  • Capucine Renard (reprise Muriel Mingarelli)
  • Anne Rotger

Lumières et bande son

  • Jean-Claude Fonkenel

Assistanat à la mise en scène

  • Jean-Daniel Paris

Coproduction

  • La Compagnie
  • Avec l’aide du Théâtre des Arts  de Cergy-Pontoise

La tentation est forte : que là où tout doit avoir lieu – la scène du théâtre – il ne se passe rien du tout … pour que tout ait lieu en effet.

Au départ, peut-être? la beauté de gestes infimes au cours d’une répétition : une feuille qui tombe, un chuchotement imprévu, une porte qui se ferme doucement toute seule dans un silence. La beauté du vide qui se peint soudain sur le visage des acteurs qui attendent pour reprendre.
Ou leur fou rire.

Ou bien, juste avant une prem1ere, voir les techniciens évoluer sur le plateau, effectuer des gestes simples. Laver le sol, choisir un outil, réfléchir en silence où planter un clou. Rien, des riens. Un escabeau, une bassine, une serpillère essorée. Se gratter une fesse, le visage tourné vers le ciel en attendant que le projecteur descende des cintres. Rien. Mais d’avoir lieu sur un théâtre – ou bien quoi ? – ces riens fabriquent, parfois, une inexplicable splendeur.

Donc, ces riens d’importance, les tordre pour en extraire leur jus ou se laisser tordre par eux vers quelque logique implacable. Tordre, agencer comme des pièces de puzzle, choisir. Que ces détails deviennent une fresque, comme toujours au théâtre, qu’elle soit belle et cruelle, ridicule aussi. Se donner un mal de chien pour faire avec rien, pour dire ce qui tient tant à cœur avec rien, du vide. Tendre vers le vide.

Jean-Michel Rabeux, Mai 1989

Ils comptent bien qu’on leur pardonne sous le prétexte éculé qu’ils ne savent pas ce qu’ils font. Eux, nos personnages.

Comment pardonner leur outrecuidante invraisemblance, leur incohérence, leur sans queue ni tête, ridicule achevé qu’ils mettent à piétiner allègrement la scène dressée dans nos têtes.

Ils nous couvrent de ridicule et de méchanceté, ils se battent entre eux sans autre raison que de s’arracher nos sujets les plus intimes de douleur. Ils les jettent sur le sol pour les laver à grands coups de serpillères, des seaux, ils ont des balais, des pinceaux, des chansons, des palots baveux, des contorsions, des chasses à courre, des baffes, des accordéons, des livres et du silence. Ah ! leur silence ! leur insolent silence !

Quand ils chantent, ils chantent faux, quand ils parlent, ils chuchotent, ils trament contre nous. Ils se font laids pour être beaux, mais beaux ils échappent aussitôt à nos doigts fiévreux. Ils nous peignent l’intérieur des yeux. Ils ne font rien, mais rien, pendant dix minutes de montre. Rien. Ils attendent qu’on s’énerve, qu’il ne se passe plus rien d’autre en nous que le vie. Peut-être. Et même ça ils ne le font qu’à moitié, ils le bâclent.

Ah ! la ! la !

Marc Mérigot et Jean-Michel Rabeux, Mai 1989

Création
en juin 1989 au Théâtre des Arts de Cergy-Pontoise 

Tournée
Théâtre de la Tempête – Paris, Théâtre 140 à Bruxelles